Plein de choses neuves !
Je ne vais pas rechigner, grogner ou pester cette fois-ci, mon humeur est « plutôt » bonne et l’énergie est haute et plus ou moins stable. Je me fais une cure de sève de bouleau conseillée par mon phytothérapeute, est-ce cela ? Un petit shot au réveil, je pense que ça me fait du bien. Les coups de mou se font plus rares, faut dire que j’apprends à les « prévenir » donc y a pas beaucoup d’écarts ou de folies dans ma vie mais c’est pas grave, ça me va, j’aime bien le calme et la routine qui rassure. Dodo très tôt, j’adore. Agenda avec des plages bien bien vides, le rêve… même si je les remplis aussi vite en écriture et nouveaux projets. Vie sociale très calme, tout ce que j’aime. Je pense aussi que la fatigue post-opératoire s’est estompée. Le dicton est donc bien vrai « Il faut un mois par heure d’anesthésie pour récupérer ». Pas de chance pour moi, le 30 mars, c’est 4 à 5 heures sous narcos. La règle de trois est vite faite, nondidjou, j’ai décidé que la récupération serait plus rapide cette fois-ci. Il me reste donc 2 semaines et des rawettes (chers amis français, vous devenez nombreux, il est temps que vous appreniez un peu le « belge ») pour profiter « à fond » pour faire « plein » de choses que les gros coups de mou un peu trop fréquents des dernières semaines/mois m’empêchaient de faire. Parfois, ils refrappent puis ils repartent, je les accepte mieux et surtout, je leur obéis. J’ai souligné le « à fond » et le « plein » parce que je me sens gourmande de projets, gourmande de créer, gourmande de vivre, gourmande de profiter.
Est-ce que je suis super excitée par l’opération ?
Non, pas vraiment. Je ne suis pas excitée par la solitude pendant la semaine à l’hosto, Covid oblige, et les suites opératoires dont la fatigue. Je déteste la fatigue, et pourtant je sais à quel point elle est un excellent indicateur pour s’arrêter mais il n’empêche que je la déteste. J’ai envie de faire plein de choses et je suis frustrée de, de nouveau, devoir composer avec l’asthénie, la douleur, la rééducation, … ça devient un peu long je trouve, mais je suis néanmoins très contente que ça avance. J’essaie de voir le processus de reconstruction comme un voyage à l’étranger en 4 escales… je vais essayer de penser à un endroit que j’adore pour la deuxième escale. L’île de Skye peut-être… sous le soleil bien sûr et quand la bruyère est en fleurs sinon c’est hyper cafard !
L’expandeur est gonflé à bloc toutes les deux semaines.
C’est pas une partie de plaisir mais c’est pas l’enfer non plus. Les deux premières nuits après la gonflette sont franchement inconfortables, puis ça passe. J’ai juste un petit pli à un endroit précis qui pousse sous la peau et qui fait comme si quelqu’un appuyait en permanence sur un hématome mais j’arrive à y faire abstraction. Je trouve magique de se dire qu’en injectant 30cc toutes les deux semaines, la peau se soit à ce point détendue pour être prête à accueillir un nouveau sein. Quelle résilience et quel stretching. Même si pour le moment, ça ressemble à un sein franchement difforme quand je suis nue, ça fait son effet quand je suis habillée, un joli galbe sous une petite robe ou un pull sympa. Il est bien plus haut que le sein en bonne santé qui donne l’impression d’être descendu d’un étage, mais peu importe, je suis contente. Ça ne tient pas à grand-chose, 130 grammes pour être très précise mais ça me fait du bien. Ce galbe me fait du bien. Parfois j’ai honte de dire ça, mais je me sens plus féminine comme si ça ne tenait qu’à cela. Je suis plus heureuse de m’habiller le matin, je préfère mon reflet dans le miroir, je me sens plus confiante dans mon corps. Mon corps de femme. J’ai dit « plus » confiante mais c’est pas encore gagné, j’y reviendrai plus bas de manière très ouverte.
Autre nouvelle…
Les règles du marketing diraient que c’est trop tôt pour annoncer la sortie du podcast parce que le premier épisode ne sera live que le 15 avril, mais je m’en fous, y a pas de marketing commercial pour Cancer, je gère alors je vous le dis : la bande-annonce de mon nouveau bébé, le podcast “Naître princesse, devenir guerrière”, est en ligne sur toutes les plateformes d’écoute et plus bas dans ce post.
J’ai dégoté du bon matériel à un prix raisonnable pour enregistrer, je bricolerai certainement au début, c’est un nouveau métier donc j’apprends et y aura certainement plein de petits glitches. Ce ne sera certainement pas parfait mais je me dis que si on veut que les choses soient parfaites à 100 pourcent, on ne les démarre jamais. C’est Reid Hoffman, le fondateur de LinkedIn qui dit “Si vous n’avez pas honte de la première version de votre produit, vous l’avez lancé trop tard”, j’aime vraiment bien cette citation ! Allez, on se lance avec toutes ses imperfections ! Et puis ça veut dire quoi “être parfait” en plus ? Une chose que je vous promets, ce sera parfaitement vrai, parfaitement authentique et parfaitement sympa et les invités seront parfaitement vrais, authentiques et sympas et c’est ça le plus important je trouve. Mon besoin de partager cette bande-annonce est devenu incompressible, urgent, presque comme une pulsion, un élan comme la sève qui monte au printemps et que j’avale tous les matins, alors voilà ! Zou, ouvrez grand les oreilles !

J’espère que ce podcast vous fera du bien. Est-ce qu’il s’adresse seulement aux femmes touchées par le cancer ? Oh que non ! Il s’adresse aussi aux accompagnants et puis à tous les autres qui ne sont pas touchés par la maladie. Ce sont de belles histoires de résilience, des échanges sur la vie, des moments de partage. J’ai toujours été fascinée par le métier de Lilou Macé, je trouvais ça tellement génial qu’elle voyage dans le monde entier pour aller interviewer des personnes extraordinaires. Alors moi, je ne vais pas voyager dans le monde entier mais j’interviewe, comme Lilou, des personnes extraordinaires et je me nourris de ces échanges. Et puis, il y a toute la joie de les partager avec vous. Il n’y a pas de plus beau métier quand on aime l’humain, le vrai, la relation, découvrir l’univers de l’autre. Bon, je suis pas du tout sûre que je serai une bonne « intervieweuse » mais j’écouterai et je parlerai avec mon cœur… et on verra…
Quoi d’autre ?
La cane pond et je me suis lancée dans quelques réflexions philosophiques à deux balles, enfin pas tout à fait à deux balles. J’essaie de retranscrire les idées et les sensations parce qu’elles m’ont chipotée.

L’année dernière, quand j’ai découvert le premier œuf, j’ai ressenti une joie intense. Je ne vais pas répéter (pour les nouveaux lecteurs) toute l’histoire et les stratagèmes que j’avais mis en place pour protéger ces œufs/futurs bébés des foutus prédateurs. Mon implication avait été énorme et je trouve que les attentes sont très souvent proportionnelles au degré d’implication. En fait, c’est plutôt « les attentes sont proportionnelles aux sacrifices », mais ce n’était en rien des sacrifices, j’ai tellement aimé faire tout ce que je pouvais pour voir éclore ces petits œufs. Je ne vous dis pas l’intensité de la joie de l’anticipation (ça fait un peu beaucoup de compléments mais vous avez compris) d’accueillir 9 petites créatures. Qui n’est pas attendri par ces petites boules de plumes si vulnérables ? Je suis sûre que même les psychopathes et sociopathes le sont.
Passionnée de photographie, j’ai aussi passé des heures à les shooter, je me fixais des petits challenges qui me forçaient à m’arrêter, les shooter au moment du décollage de la mare ou l’atterrissage, les shooter quand ils battaient des ailes ou d’autres moments uniques. Je peux vous dire que ça a fait un paquet d’heures d’attente dans le silence pour capturer le moment idéal, c’était presque méditatif, ça faisait du bien. C’est comme si le temps s’arrêtait. J’ai adoré les apprivoiser, les nourrir, les regarder, les attendre, les entendre, les aimer. Oui, les aimer, c’est un peu étrange à dire, mais j’ai de l’affection pour eux, même énormément, ça me fait du bien d’aimer, j’aime les aimer. J’aime aimer, j’ai besoin d’aimer.
Ce qui m’a franchement chipotée cette année, c’est que je n’ai pas ressenti la même joie en découvrant le premier œuf que j’attends quand même depuis un mois. On va plutôt dire que la joie n’était pas aussi intense comme si je me disais “ouais, je connais, déjà vu, déjà vécu, c’est bon, rien de neuf” et puis j’ai extrapolé aux premières fleurs, aux premières fraises des bois, aux premières feuilles de mon tulipier et je me suis “Merde, je suis blasée ou quoi ? Pourquoi la joie de l’anticipation n’est pas aussi intense que l’an passé ?”
Est-ce qu’il faut que les choses soient neuves pour qu’elles procurent une joie intense ?
Est-ce que l’habitude tue la joie ? Eh oh, on ne va pas parler d’habitude pour une deuxième couvée de canetons, l’arrivée du printemps et les premiers boutons de camélia… “Pfft… même chose que l’an passé alors ça m’fait plus rien”. Quelle horreur et complètement faux. Prenons la joie d’être au coin du feu par exemple, une joie simple qui se répète sans cesse, quasi tous les jours pour moi. Il n’y a rien de neuf, et pourtant… certains jours, la joie est très intense, d’autres un peu moins mais elle ne va pas “decrescendo” avec le temps. La joie de la première gorgée de café le matin, la joie d’arranger des bouquets de fleurs, la joie de retrouver ses kids après une semaine d’absence ne vont pas decrescendo non plus. Heureusement ! Vous vous imaginez si c’était le cas ?
Comment créer cet espace pour que les “choses” qui se répètent procurent la même joie, ou plutôt la même intensité de joie ? Est-ce que c’est possible de se remettre dans le même état d’esprit ? C’est pas quelque chose qui se contrôle, c’est quelque chose qui se vit, qui se ressent. Est-ce que c’était lié au cancer où tout était intensifié ? A la « première » couvée de canetons de ma vie ? Au « premier » printemps dans la nouvelle maison ? « Premier, première », comme s’il fallait que ce soit neuf pour que ce soit intense… La réponse est non mais il y a quand même matière à réflexion… une question d’ouverture ? Je réfléchis. N’hésitez pas à partager vos réflexions en commentaires ci-dessous.
Alors comment vous raconter la suite sans passer « sans la moindre nuance » pour une nénette qui a besoin de plaire et de savoir qu’elle plait. On sort de cette idée réductrice et on se met dans la peau de la femme qui a perdu un sein (ou deux ou un morceau de sein) ou de la femme dont les traitements ont solidement taxé le corps et l’image qu’elle a de son corps. J’englobe donc toutes les maladies, il n’y a pas que la perte d’un sein ou le cancer du sein. On a beau entendre les copines dire “T’es toute mimi, tu es magnifique, tu es séduisante, tu es super féminine, tu peux encore plaire”… je pars parfois dans des trips un peu idiots et pas rigolos “Si je perds mon mari, je ne plairai plus jamais à personne” comme si ce cancer, ce sein en moins, tous mes traitements, mes cicatrices m’avaient enlevé toute ma féminité… “Mais non, Delph, avec quoi tu viens ?” Je viens avec ce qui se passait et ce qui se passe encore dans ma tête par moments, et j’avoue que ce n’est pas facile de vous ouvrir mon cœur à ce point. J’avais (ou j’ai…) perdu confiance en mon corps de femme, en ma féminité, en ma sexualité, en moi en tant que femme. Bien souvent (ça va beaucoup mieux depuis la première opération de reconstruction), je ne me sentais plus rien en fait, ni femme, ni homme. D’ailleurs, si je devais choisir un genre, je dirais “rien” ou “malade”. Je sais qu’il y a beaucoup de genres de nos jours mais “rien” ou “malade” ne sont pas des genres. Eh bien ils l’étaient devenus dans mon vocabulaire. Très dur par moments… et pourtant je trouvais ce torse d’amazone parfois, même souvent, magnifique. L’un n’empêche pas l’autre. C’est complexe, c’est même archi-complexe et parfois indescriptible, ça se vit, ça se ressent et je pense qu’on a toutes, nous les femmes, vécu à un moment donné dans notre vie cette perte de confiance en notre féminité, en notre corps de femme. Le post-accouchement, quand on se fait larguer, après une maladie, après avoir pris trop de kilos, quand on est déprimée et j’en passe… la perte du sein vient rajouter une petite couche qui vient nous toucher au plus profond de nous-mêmes et remet pas mal de choses en question.
Paul Schilder en 1935 définit l’image du corps comme « la représentation à la fois consciente et inconsciente du corps, désignant non seulement une connaissance physiologique mais renvoyant également à la notion de libido et à la signification sociale du corps ». L’image du corps est l’image de notre propre corps que nous formons dans notre esprit, c’est donc davantage une vision psychologique où prédomineraient les attitudes et les sentiments éprouvés pour le corps, son apparence physique et la représentation mentale de soi dans son contour, son volume, sa surface, son poids, sa solidité.
La relation à notre corps est tellement subjective et c’est cette relation qu’il faut soigner en premier. Que je dois soigner en premier…
Je reviens sur la notion de la nénette qui a besoin de plaire et de savoir qu’elle plait. L’histoire est simple et courte mais elle m’a fait du bien. J’ai atterri dans un ascenseur avec un homme très élégant et franchement pas mal, nous déposions tous les deux notre test COVID au labo de Saint-Pierre. De nature curieuse dans le sens où j’aime bien découvrir le petit voyage intérieur de l’autre, je lui ai posé plein de questions « Vous n’avez pas l’air malade, vous faites le test parce que vous partez en voyage […] oh trop bien, vous allez où […] chouette vous allez trouver du bon soleil… » et puis, comme je suis un peu à la maison à Saint-Pierre, je le lui ai dit et je lui ai raconté en quelques mots les moments forts des deux dernières années. C’était un chouette échange, il m’a fait des compliments sur mes yeux (on ne voit pas grand-chose d’autre avec ces foutus masques) et sur le fait que je rayonnais, et nous avons marché ensemble jusqu’au parking en échangeant. Tellement triste que certains hommes fassent parfois l’objet de reproches parce qu’ils disent à une femme, sans la moindre arrière-pensée et du fond du cœur, qu’elle a de jolis yeux. Bête petite histoire que je suis presque gênée de vous partager mais je suis sûre que les femmes pourront s’identifier, ça m’a fait du bien, ça m’a fait du bien d’entendre ces compliments d’un homme. Didier me dit souvent que je suis belle, mais c’est venu rajouter une petite couche qui fait du bien quand on a solidement perdu confiance en sa féminité. J’ai encore du chemin à faire…
Je vous embrasse bien fort, prenez soin de vous et je me réjouis de vous retrouver tout bientôt pour de nouvelles aventures.
Dans le même genre de philosophie, je me dis, quand je suis hyper à plat à cause de la fatigue: « il faut des jours moins bons pour qu’il y en ait de meilleurs. Sinon on ne verrait pas la différence!😀😘
J’adore!!!!! C’est meme pas le verre a moitie rempli, il est full rempli!!! Belle philosophie… et c’est vrai en plus, pas de joie si pas de peine, c’est un package all-inclusive a prendre ou a laisser! Belle journee et enormes bisous!
Alors je te rebaptise si tu me permets
Delphine Punchy
Au nom du Pere du fils et du saint (sein.sain.ceint.seing… comme t’y veux t’y choises)esprit
Merci pour cette gonflette … et pas que du sein
Un tout plein de bises toutes pleines d’amour ❤️
J’ai ri aux eclats et ca a fait un bien fou!!! Je choisis “saint” parce que je ne le suis absolument pas… sain? Saine d’esprit? Le suis-je? Allez si la gonflette du sein te donne un petit coup de gonflette du moral, alors je suis ravie, je vais encore en redemander alors! Bisous bisous et vivement vendredi! Lots of love.