Le pouvoir insoupçonnable de l’Accueil…

Le pouvoir insoupçonnable de l’Accueil…

Accueillir...

Vous m’avez entendu dire ce mot si puissant moulte fois, je me suis même amusée à faire une recherche sur le mot ou la partie de mot « accueil » et il ressort à chaque blog depuis que j’en ai compris tout le sens, ou plutôt depuis que j’en ai fait toute l’expérience. C’est un peu comme si c’était le « mot clé » de l’entièreté du blog. Le message clé du cancer. La leçon ultime de la maladie. Et si vous avez un peu suivi l’histoire, vous savez dès à présent qu’il ne vient pas vraiment de moi. Enfin… on va dire qu’il n’était pas trop dans mon jargon à part pour dire « accueillir des invités ou quelqu’un à ma table ou à loger ». Il vient de Xavier et il a déjà pas mal changé ma vie même si j’ai encore un sacré chemin à faire… Pour être honnête avec vous, je skippais souvent la phase importante de l’accueil ayant comme motto « let’s do it » en mode bulldozer comme disent les ados. On ne se lamente pas, on ne se plaint pas, on sort de sa zone de confort, on avance et on est acteur de sa vie. Si quelque chose ne fonctionne pas comme on l’entend, on bouge son cul et on redémarre. Allez go go.

Ce cancer m’a quand même un peu fait revoir ma méthode.

Quelle belle opportunité parce que je ne suis pas sûre qu’elle aurait fonctionné indéfiniment, je m’éreintais un peu. Quelle belle opportunité mais quel beau bordel aussi ! On perd ses repères et il faut redécouvrir ce qu’on veut et qui on est vraiment. La nouvelle méthode est plus soft et me respecte plus. Une méthode qui, me semble-t-il, pourrait convenir à tout le monde puisqu’elle demande de s’arrêter un instant pour accueillir « ce qui est », pour ressentir, pour ressentir au plus profond de soi plutôt que de passer à autre chose sans apprendre, plutôt que de condamner ou de juger, plutôt que SE condamner ou de SE juger.

J’écris tout cela comme si je maîtrisais cette méthode à cent pourcent mais oulala, j’ai encore beaucoup à apprendre. Et puis, je vous rassure tout de suite, je n’ai pas fait ce cheminement ou ces découvertes toute seule non plus… j’ai un excellent coach et vous commencez à bien le connaître ! En plus du temps de parole et du Reiki, j’ai droit à une initiation aux grands penseurs (dont Spinoza cité plus bas) pour nourrir ma réflexion et m’aider à répondre à mes grands questionnements. C’est pas formidable ça ?

Le blog sur la féminité, malgré son message positif, ne m’a pas que donné la pêche, sa rédaction a remué un paquet de choses, agréables et moins agréables. Je me suis pris la tête à juger tel ou tel comportement pré-cancer et à me juger. Et en plus à me juger de ne pas être capable de trouver des réponses claires à certaines questions. Eh oh, il était temps d’arrêter la spirale, le mental, le négatif et juste accueillir les émotions, les questionnements et aussi les jugements. Oui, aussi les jugements. Sans les juger. Accueillir sans juger.

Accueillir sans juger…

Je préfère passer par cette étape de l’accueil même si la citation de Spinoza va un pas plus loin « Ne pas se moquer, ne pas déplorer, ne pas detester mais comprendre ». Simplifions pour l’exercice « Ne pas juger et se juger, mais comprendre ». Et si on disait ‘accueillir’ avant de vouloir ‘comprendre’.

Pour ce blog, je vais plutôt parler d’émotions négatives, de tristesse, de difficultés tout en sachant qu’on peut bien évidemment accueillir de la même manière de belles nouvelles, des émotions positives et de grandes joies… Je me souviens du petit bonhomme de Headspace (app de méditation) dans mes écouteurs qui disait que c’était ok d’entendre les bruits de la rue, des petits oiseaux ou de penser à sa to-do list en pleine méditation, il fallait juste accueillir toutes ces distractions ou ces idées et puis les laisser partir tranquillement pour se recentrer sur soi-même (welcome, acknowledge and let go). J’aimais beaucoup parce qu’il y avait cette absence de jugement. Non seulement, on n’était pas jugé de penser à sa to-do list mais en plus, on devait tout accueillir sans juger.

Accueillir les émotions, la colère, la frustration, l’angoisse, juste les accueillir et les ressentir. Rien de plus. Est-ce passif ? Faut-il les comprendre tout de suite ? Xavier mentionnait que les orientaux parlaient du yin de l’accueil et du yang de la compréhension et vous savez comme moi que le yin et le yang n’existent pas en eux-mêmes ni hors d’une relation les liant.

Pour revenir à la question « Faut-il tout comprendre tout de suite ? », je ne peux pas répondre à votre place, mais je constate que la première phase de l’accueil permet de ressentir au plus profond de ses tripes, même physiquement. Et puis je constate aussi que « tout ce à quoi je résiste, persiste » pour citer Carl Jung. Et vous ? Je pense qu’il ne faut pas trop se creuser la tête pour trouver un exemple… il y a de fortes chances que tout ce que je n’accueille pas ou que je rejette revienne en boomerang et prenne même de la force… Je parlerai peut-être de la suite de la citation un peu plus bas, on verra « … et tout ce que j’embrasse s’efface. »

Tout l’art évidemment est de ne pas s’identifier à toutes ces émotions pendant cette phase d’accueil, d’observation et d’acceptation. Comment ne pas leur laisser toute la place ? Je suis avec l’émotion, je la ressens mais je ne suis pas cette émotion.

J’étais super en colère (Blog « J’étais énervée » et Débat sur la colère dans « C’est un marathon, pas un sprint ») car je me sentais emprisonnée par ce cancer avec une incapacité de bouger nulle part. J’étais furieuse sur la maladie et en plus pour couronner le tout, je me jugeais d’être en colère et d’être incapable de passer à autre chose. Oh en plus de tout ça, à la même époque, je me jugeais d’avoir développé cette peur panique de l’hosto. J’étais devenue la colère, une boule de colère, la colère qui nourrissait la colère, la voiture embourbée qui s’embourbe davantage. Delph ! Stop, stop, stop… Merci à Xavier qui m’a aidée à accueillir cette colère, juste l’accueillir sans la juger. Et puis les étapes suivantes, la canaliser, la comprendre et la transformer en énergie libératoire et force de vie. Je trouve que cette première étape de l’accueil permet d’avoir accès aux besoins profonds.

Je fais un coq à l’âne mais je ne vous ai jamais raconté que pendant ces quelques jours de colère intense, j’avais eu l’intention de monter toutes mes assiettes ébréchées pour les balancer du premier étage tellement j’étais fâchée sur la situation et aussi fâchée sur moi. William m’avait gentiment fait remarquer que la terrasse est en bois et que ce n’était peut-être pas une excellente idée ! Quelques jours plus tard, Nathalie qui venait d’apprendre qu’elle avait un cancer et à qui je n’avais évidemment pas parlé de mon plan « explosion d’assiettes » m’a laissé un long message sur WhatsApp. Elle me donnait des news et m’a raconté qu’elle avait reçu un cadeau assez surprenant de la maman d’un copain de son fils : 5 assiettes HEMA. Cette maman avait aussi eu un cancer. 5 assiettes destinées à faire ressortir la colère… et à la transformer en une belle énergie. Xavier parle de colère intelligente.

Vous savez, à l’heure où je vous écris, je suis quand même un peu en train de me juger en me disant « Dis donc Delph, t’as vu tout ce que t’écris dans tes blogs, est-ce que tu vas toujours vivre en accord avec cela ? Tu n’es plus crédible si tu n’appliques pas ta méthode tout le temps ? » Je dois aussi accueillir ces doutes et ces jugements sans me juger…

Bye bye les jugements, l’ego et le puissant mental !

Comment accueillir qui on est au fond de soi si on ne crée pas un espace où on vire les jugements, l’ego et notre puissant mental, pourtant bien utile pour organiser notre vie quotidienne, mais qui s’appuie sur un paquet de croyances qui se cristallisent dans notre réalité ? Et qu’est-ce qu’elles font ces croyances ? Elles produisent des jugements : jugement de soi, des autres et du monde. Et plus nous nous attachons à ces croyances et donc à notre puissant mental, plus nous devenons nos propres pensées. Stop stop stop encore ! Accueillir sans juger, mais d’abord accueillir les jugements, les regarder, les observer et les laisser s’évaporer. J’adore l’image, j’imagine la vapeur. Reconnaître que les jugements sont comme un paravent, une façade ou même un mur de pierre qui occulte qui nous sommes vraiment. Si vous êtes une coriace comme moi, essayez de ne pas encore juger le jugement parce que sinon ça ne s’arrête pas…

Dis donc, c’est pas une mince affaire de déjà « accueillir ce qui est », mais alors accueillir sans juger et se connecter à qui on est vraiment est tout un programme bien laborieux, une bumpy road avec un bel objectif vers lequel on peut tendre. C’est peut-être même bien le travail de toute une vie… un vie plus connectée a soi-même. « Quel est le souffle vivant qui vient du plus profond de moi ? »

Si vous avez envie de faire un petit exercice avec moi, je vous y invite. J’ai décidé d’avoir un petit carnet dans mon sac pendant deux semaines (et plus si affinité !) où je vais noter tous mes jugements pour laisser de l’espace à ce qui a probablement toujours été présent mais n’a pas encore pu s’exprimer pleinement.

Next steps…

Je trouve que ce blog prend une tournure un peu théorique et « coaching de vie » mais bon… Je voulais juste vous partager mes réflexions, mes découvertes, mes jugements et mes doutes et c’est la tournure que ça prend…

Je continue la série… Accueillir sans juger, ressentir, comprendre et pourquoi pas transformer les difficultés en opportunités de grandir et d’évoluer.

  • Un cancer, c’est tout de même dur et ‘négatif’.
  • Non, je ne suis pas d’accord avec vous, c’est très positif, c’est une expérience très enrichissante.

Déso mais je vais un peu repasser par la case « jugement » pendant quelques secondes avant de rebondir sur les épreuves comme étant une opportunité d’un « chemin de conscience » et un tremplin pour grandir et développer un goût plus grand pour la vie. Une opportunité à ne pas manquer. « Ce qui est dans la voie devient alors la voie » et c’est magique.

Je ne devrais pas juger mais… parfois ça m’énerve au plus haut point de voir comme certaines personnes restent dans un état de négativisme, d’immobilisme, de plainte constante et de victimisation comme si c’était leur raison d’être et leur moteur de vie. Ils ont probablement été victimes une bonne partie de leur vie et c’est très triste mais j’ai envie de dire allez allez, y a moyen de rebondir… Chaque obstacle auquel nous faisons face est unique pour chacun et, même si les réactions sont souvent les mêmes (frustration, confusion, colère, impuissance, dépression, …), je pense qu’il y a toujours moyen de transformer ces obstacles en une force. Vous vous souvenez certainement de cette citation de Nietzsche « Ce qui ne me tue pas, me rend plus fort. »

Est-ce déplacé de ma part de dire cela car j’ai un mini souci médical par rapport à tant d’autres ? Je n’ai pas perdu d’enfant, ni un enfant malade, ni de métastases au cerveau et Did ne m’a pas quittée… Peut-être que certains le penseront.

J’ai trouvé ceci sur le net et j’aime beaucoup « L’étendue de la lutte détermine l’étendue de la croissance. » C’est quand même génial de changer sa perspective pour découvrir les avantages et les opportunités qu’un obstacle cache sous la surface.

J’ai parlé un peu plus haut des difficultés comme étant une opportunité d’un chemin de conscience. Je pouvais réagir de trois manières par rapport à ce qui m’arrive. Soit « pourquoi moi, c’est complètement injuste que ce cancer me soit tombé dessus », je m’installe en victime et je n’en retire que dalle. Soit je trouve un sens et je mets toutes les chances de mon côté de guérison physique et émotionnelle pour pouvoir enfin retourner à une vie normale. Et dernière possibilité, pourquoi ne pas profiter de cette année bien intense pour me libérer de ce qui m’entrave et se loge dans mon foutu mental. Ces interprétations, ces déductions, ces conclusions, ces pensées limitées et limitantes qui empêchent d’avoir accès au Vrai Moi et à l’amour de soi (vaste sujet…). Une occasion inouïe pour se reconnecter (peut-être même d’enfin se connecter, pas se reconnecter). Une fois de plus, j’ai eu beaucoup de soutien donc aussi credit to Xavier, Didier, Caro la réflexologue et d’autres qui m’aident dans ce cheminement. 

Et voilà, la boucle est bouclée, mon blog est presque terminé, la thèse rejoint les hypothèses de départ. J’ai une drôle d’impression, comme si j’avais démontré de manière logique un théorème mathématique.

Je voulais terminer par ceci...

C’est l’histoire d’une belle rencontre qui a eu lieu vendredi dernier à l’hôpital Saint-Pierre. Alors que je faisais la queue pour commander un carpaccio de bœuf avant que la chimio ne commence, un jeune ambulancier me tape sur l’épaule et me dit avec beaucoup d’émotion « Je vois que vous avez le cancer et que vous faites de la chimio, je voulais vous dire que je vous admire de vous battre contre cette maladie, et en plus avec le sourire. J’admire toutes les femmes qui se battent.

[PAUSE. Je sentais que l’émotion montait, chez lui comme chez moi.]

Ma femme a aussi le cancer. »

Re-émotion chez lui comme chez moi.

Je ne vais pas vous retranscrire toute la conversation, je n’ai pas pu m’empêcher de lui poser un tas de questions sur sa femme et sur lui. Sa femme a eu un cancer de l’utérus, elle a des métastases au cerveau et elle est devenue aveugle. Il a 4 enfants dont les aînés, des jumeaux, ont 9 ans. Je n’ai pas non plus pu m’empêcher de lui parler des gens proches que je connais qui ont des métastases au cerveau depuis des années. Tout ce que je voulais, c’est lui donner de l’espoir. Il a répondu « L’espoir fait vivre ». J’avoue que tout ce que j’aurais vraiment aimé, c’était de faire disparaître le cancer de sa femme. Les larmes lui montaient aux yeux jusqu’à ce que cela devienne impossible pour moi de ne pas lâcher mon café, mon sac et le carpaccio, arrivé entretemps, pour le serrer dans mes bras. Très très fort contre tout son attirail d’ambulancier et lui dire que je pensais si fort à lui. J’ai regagné ma chambre et évidemment, j’ai éclaté en sanglots sans pouvoir m’arrêter.

C’est lui qui m’approche pour me féliciter de mon courage, mais c’est lui qui a besoin de tout ce courage pour affronter les années à venir. Il y a toujours cette réaction au plus profond de moi quand je croise une autre ‘malade’ qui trinque plus que moi : « pourquoi elle a des métastases et moi je suis épargnée », une espèce de révolte que le sort se soit plus acharné sur l’autre qui s’est battue de la même manière. C’est une découverte je dois dire, mais on développe un sens aigu de la compassion envers ceux qui vivent la même chose, et d’autant plus aigu envers ceux qui sont plus loin dans la maladie. Je sais aussi que je dois faire gaffe car je peux me faire complètement absorber par la peine de l’autre…

Je suis redescendue à la cafète à la vitesse de l’éclair pour avoir le numéro de son épouse, il n’était plus là. J’ai foncé jusqu’aux urgences pour le retrouver, je me suis retrouvée dans le hall d’arrivée des ambulances, sans manteau, la tête découverte en plein froid et le cathéter pendant, à raconter mon histoire pour essayer de retrouver cet ambulancier, je ne l’ai pas retrouvé, il ne faisait pas partie de l’équipe de Saint-Pierre.

Ces rencontres, et il y a en a eu tant d’autres, sont des petits moments magiques où le cœur s’exprime et les larmes coulent d’émotion. Des moments uniques qui permettent de donner et de recevoir et de se connecter au plus profond de soi-même et à l’autre. C’est de toute beauté et ça fait un bien immense.

Crédit Photo de la bannière : Amélie de Wilde

7 Comments
  1. « Faut-il tout comprendre tout de suite ? » Je crois que tu as semé plusieurs de tes lecteurs. Par contre les émotions décrites lors de ta rencontre avec cet ambulancier sont très touchantes ! Merci de partager ces belles expériences de vie !

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